lundi 6 avril 2015

3. Christine de Pizan


         Christine de Pizancapitaine de son navire, bien que mariée, est connue sous son nom de jeune fille par respect pour son père, mais surtout parce qu’elle s’aventure sur la route inédite des femmes auteures vivant de leur plume.
Deux siècles ont tout juste passé depuis la mort d’Héloïse, quand naît à Venise la petite Christine de Pizano. Son père médecin et astrologue, est invité par Charles V qui cherche à lier des relations avec la Sérénissime. En 1371, la famille toute entière s’installe à Paris, Christine a cinq ans, la France vit au rythme de la guerre de Cent ans qui a débuté depuis une génération déjà. Confortablement doté par le roi, le Vénitien marie sa fille de quinze ans à Etienne Castel, âgé de vingt-quatre ans, secrétaire et notaire du roi, en pleine ascension sociale, dans un monde rendu vide par les guerres et les épidémies successives de peste décimant l’Europe depuis un quart de siècle. La jeune épousée vit dix années de bonheur, de prospérité et d’insouciance. Le malheur frappe soudain quand le roi à peine âgé de quarante-trois ans décède suivi de peu par le père de Christine. Malgré ce premier coup du sort, les Marmousets qui sont au pouvoir offrent de belles perspectives de carrière à son époux mais il meurt lui aussi, lors d’une occurrence du Grand mal en 1390. Christine est, à vingt-cinq ans, veuve, couverte de dettes ayant à charge un fils, une fille et une nièce. Elle ne peut donc entrer au couvent et refuse de se remarier.


Après une violente dépression aux relents suicidaires, elle décide de vivre de sa plume, écrivaine de langue française, contribuant par ses textes au développement savant de la langue vernaculaire. Veuve et solitaire, acharnée à l’étude, elle est en peu de temps une poétesse et philosophe assurée. N’hésitant pas, à trente-quatre ans, à défier les fins lettrés de son temps dans la violente querelle du Roman de la rose en se posant en championne de l’honneur des dames. Savante mais aussi femme d’affaire, elle constitue et dirige un atelier de copistes qui reproduit ses œuvres offertes ou vendues aux puissants. Première femme à vivre de sa plume, elle rembourse les dettes de son père, celles de son époux et établit son fils.
Le duc Jean de Berry achète ses œuvres quand le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, lui commande Le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V et engage son fils Jean. L’année suivante la guerre civile fait rage de nouveau. Restée à Paris la femme de lettre se plonge dans l’écriture, les temps ne sont plus au mécénat. Elle versifie pour la défense de l’honneur des dames et sauver la France de la division. Deux de ses livres font sa renommée : Le livre de la cité des dames et Le livre des trois vertus ou Le trésor de la cité des dames, écrits en 1405-1406, où elle donne  à ses contemporaines des conseils pratiques afin qu’elles prennent conscience de leur rôle social. Paris passe aux mains des Anglo-Bourguignons, son fils change d’allégeance, rejoint le parti du roi Charles VII et le suit en exil à Bourges.
Christine se réfugie auprès de sa fille, au prieuré royal de Poissy. Elle apprend peu avant sa mort le sacre du dauphin exilé et le rôle joué par Jeanne d’Arc. La poétesse rédige en son honneur sa dernière œuvre, Ditié de Jehanne d’arc, dans l’euphorie suscitée par les événements de l’été 1429. La fille de Tommaso di Benvenuto da Pizzano s’éteint quelques mois plus tard à soixante-six ans.




Christine de Pizan 1364-1430                        

Pizan Christine de, Cité des dames, Ms FR 607, BnF, in Gallica, 1400-1410
Pizan Christine de, Le chemin de longue étude, Livre de Poche, 2000
Pizan Christine de, Le livre de la cité des dames, Stock, 2008
Pizan Christine de, Le livre du corps de Policie, Droz, 1967
Autran Françoise, Christine de Pizan, Fayard, 2009
Hicks E., Le débat sur le roman de la rose, Champion, 1977
Pernoud Régine, Christine de Pisan, Calmann-Lévy, 1994
Roux Simone, Christine de Pizan, femme de tête et dame de cœur, Payot, 2003



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