vendredi 10 avril 2015

7. Andrée Viollis


Andrée Viollis
 marche sur les traces de Sévérine, dont elle est de quinze ans la cadette. Collègues à la Fronde, que dirige Marguerite Durand, Andrée rédige, de 1899 à 1903, pour le quotidien des articles contre les antidreyfusards dont son ex-mari Gustave Téry, directeur de L’Oeuvrejournal pacifiste à l’antisémitisme croissant.
Comme Séverine, la jeune journaliste a plusieurs noms, née Françoise-Caroline Claudius Jacquet de la Verryère en Provence quand Paris subit les rigueurs du siège allemand, elle prend ensuite les patronymes de ses deux maris successifs Téry puis Tizac, et enfin le pseudonyme d’Andrée Viollis. Bachelière en 1890, sur dérogation et encore mineure, la jeune fille, dont le père est un ancien préfet du Second empire et la mère tient un salon littéraire, est peu après titulaire d’une double licence et diplômée de l’université d’Oxford alors que ses congénères méritantes mais de milieux plus modestes se contentent d’un cursus d’enseignantes des lycées ou de directrices, ainsi la brillante Anna Amieux. Outre ses activités qui font d’elle la première femme nommée pour le prix Goncourt en 1913, Andrée a de ses deux mariages, quatre filles, dont Simone Téry, grand reporter et écrivaine comme elle. Un an plus tard, toujours pimpante, vêtue de robes de mousseline et en talons, très féminine d’aspect et de caractère, la très petite dame d’un naturel impulsif et généreux, qui voyage en 1ère classe, descend dans les grands hôtels, se déplace conduite par des chauffeurs, obtient le statut de grand reporter pendant la Première Guerre mondiale, tout en officiant en tant qu’infirmière dans les villes bombardées de Bar-le-Duc et de Sainte-Ménehould. Durant trois ans, après-guerre, attachée à la rédaction du Times et du Daily Mail, Andrée entre aussi au Petit Parisien, pour vingt ans. Romancière, la journaliste tire de chacun de ses grands reportages, un livre. En 1930, à près de cinquante ans, quand Anna Amieux approche de la retraite, l’aventurière est le seul témoin extérieur de la révolte de Kaboul et franchit seule l’Himalaya dans un frêle avion de bois. La célébrité est au rendez-vous. Engagée contre le colonialisme, elle publie SOS Indochine préfacé par Malraux, proche du parti communiste, auquel adhère sa fille, et militante antifasciste, elle codirige Vendredi, le journal de soutien au Front populaire, à soixante-six ans. Membre de la Ligue des droits de l’homme et du Comité mondial des femmes contre la guerre et le fascisme, elle mobilise pour l’Espagne républicaine et se rend sur le front, où sa fille rédige aussi des articles pour Vendredi. Muette lors du pacte germano-soviétique, durant la guerre elle se cache à Lyon et à Dieulefit, où elle écrit Le racisme hitlérien, machine de guerre contre la France publié clandestinement en 1943-44. A la Libération, à soixante-quinze ans, elle vote pour la première fois, et écrit dans Ce soir une enquête officielle sur l’effort de guerre américain. Trois ans plus tard, elle se rend en Afrique du Sud et publie Afrique du sud cette inconnue. Andrée meurt en 1950, sans voir Simone de Beauvoir recevoir le Goncourt près de quarante ans après sa propre nomination.


Andrée Viollis 1870-1850


Viollis Andrée, Indochine SOS, Les éditeurs réunis, 1949, extrait in L'Histoire 2010
Viollis Andrée, Tourmente sur l’Afghanistan, L’Harmattan, 2003, 1ère Ed., 1930
Bari Dominique, Andrée Viollis, Le journalisme une vocation tyrannique, in L'Humanité, août 2012
Viollis Andrée, photographie, in Paris en images
Jeandel Anne-Alice, Andrée Viollis : une femme grand reporter, une écriture de l'évènement, 1927-1939, L'Harmattan, 2006
Racine Nicole, Andrée Viollis, in Maitron J., Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français : 1914 – 1939, Editions ouvrières, 1997
Renoult A., Andrée Viollis, une femme journaliste, Presses Université d’Angers, 2004

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